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Toccata
Stéphanie Masson
Toccata
Actes du théâtre n° 19.[ imprimer ]
Dans une brasserie à l’heure de pointe. Deux femmes attendent à des tables voisines et partagent le même serveur pressé. Deux femmes ont rendez-vous. Élisabeth, bientôt rejointe par Georges, mari pesant et retraité. Judith, venue rencontrer Claire – une jeune fille de dix-huit ans dont elle est la mère « biologique »…
Ce sont des silences, aveux, mensonges, chuchotements… quand on blesse aux endroits les plus tendres, quand des conversations intimes émergent de la cacophonie ambiante. Une heure violente et singulière. Quand certains vont survivre et d’autres non.

« La toccata est une composition musicale. Un morceau pour instrument à clavier dont les notes doivent être jouées rapidement, légèrement touchées et non tenues – un écheveau de traits et d’ornementations pris de mouvement perpétuel… La “toccata” au quotidien, c’est donc un lieu public. Là où le monde entre, se rassemble, pour devenir une foule : l’enjeu ici était de traverser par l’écriture dramatique cette ambiance diffuse et incertaine, ce désordre apparent cachant toujours selon moi une polyphonie ordonnée… Quelques paroles secrètes faisant écho. »
Stéphanie Masson

Création au Quartz-Scène nationale de Brest, dans le cadre du festival Longueur d’Ondes, 4 décembre 2004.
Réalisation : Blandine Masson. Avec : Clotilde Morgiève, Jean-Christophe Dollé, Féodor Atkine, Nicole Kaufmann, Chloé Réjon.

Personnages : 3 femme(s) - 2 homme(s) - Durée : 60 mn.

GEORGES De mon temps, Élisabeth, de mon temps, tu vois… Si j’en repérais un seul, tu vois, un seul près des machines, si j’en prenais un seul dans la cantine, un seul…
ÉLISABETH Donc, tu ne veux pas enlever ton manteau, tu as froid, bien sûr que tu as froid, tu es un grand garçon.
GEORGES Mais toi Élisabeth.
ÉLISABETH Moi je n’ai pas froid, mon chéri…
GEORGES Mais toi Élisabeth, tu as fait quelque chose à tes cheveux ?
ÉLISABETH Pourquoi ?
GEORGES On pourrait jurer que tu as fait quelque chose, ma pauvre Lili.
ÉLISABETH Donc, tu vas rester comme ça.
GEORGES De mon temps, tu vois, les gars marchaient droit. Pas besoin de mots, tu vois, pas une parole entre nous, pas besoin de se parler pour se comprendre. Je dis qu’on ne sait pas si un gars marche droit avant qu’il ait marché. Les gars assis ne m’ont jamais intéressé. Ce qui ne m’intéresse pas, ce sont les gars qu’il faut mettre debout toute la journée, toute la journée, debout, debout là-dedans !
ÉLISABETH (sort un sac plastique) Est-ce que tu as vu ce que j’ai acheté pour le petit ? J’ai acheté un petit vêtement pour le petit. Est-ce que tu as vu ?
GEORGES Mon manteau est trop long, si j’enlève mon manteau, il va traîner par terre.
ÉLISABETH C’est trop petit pour le petit ?
GEORGES C’est sale par terre.
ÉLISABETH Georges.
GEORGES Sale.
ÉLISABETH Pour le petit.
GEORGES Je dis qu’il ne vaut mieux pas se parler pour se comprendre.