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Blanc
Emmanuelle Marie
Blanc
Photo DR - Marianne Basler, Isabelle Carré
Actes du théâtre n° 20.[ imprimer ]
Durant trois jours et trois nuits, deux jeunes sœurs veillent leur mère qui vit ses derniers instants. Elles vont, chacune à sa façon, appréhender ces heures douloureuses. Plutôt que se sentir démunies face à la disparition de leur mère, elles trouveront des raisons sinon de s’entendre, tout au moins de s’aimer et de s’inscrire dans le mouvement de la vie.

« …C’est le titre de ta pièce qui m’a fait de l’œil. Qui m’a attirée, comme un aimant. Alors j’ai eu peur de lire. Ton titre était si beau, il promettait tellement…
Et puis j’ai lu. Tu te souviens, je te l’ai écrit. Je suis restée stupéfaite, envoûtée, bouleversée. Pour des raisons évidentes et mystérieuses, Blanc, ton texte, ta pièce, éblouit comme la vie… »
Zabou Breitman, préface à l’édition, juin 2005

Lecture par Marianne Basler et Isabelle Carré au Théâtre du Chêne Noir, Festival d’Avignon Off 2005, les 25 et 26 juillet 2005, dans le cadre de « Un Texte », une manifestation initiée par la SACD (action culturelle Théâtre) en collaboration avec le Théâtre du Chêne noir.
Production prévue en septembre 2006 dans une mise en scène de Zabou Breitman.

Personnages : 2 femme(s) -
Éditions des Quatre-Vents.

Noir sur la scène. L’aînée, seule, éclairée face au public.
L’AINEE Ça fait combien de temps qu’on m’a pas dit qu’on m’aime qu’on m’a pas dit je t’aime que j’ai pas ronronné dans les poils d’un mec sans parler de queue merde juste frotter la joue après le nombril sur la ligne de poils qui fait comme une flèche. Et des arbres combien de temps que j’ai pas vu des arbres ? L’écorce à mes mains ? Broyer les épines pour l’odeur juste le parfum des pins ce qu’elles exhalent les épines quand on les broie. Faut que je pense à ça et ça ira…
Un jour un homme me prendra dans ses bras me serrera fort et me dira qu’il m’aime… (Elle sourit.) C’est idiot…
J’ai posé le plateau sur le lit tout à l’heure. J’ai dit on t’a fait du boeuf carottes avec du riz c’est bon c’est plein de vitamines t’as faim j’ai demandé non dans un souffle elle a dit non. Alors je me suis assise j’ai pris sa main juste ça sa main. Elle dit rien rien de sa vie qui file entre ses doigts les miens juste sa vie qui file entre nos mains elle dit rien de ce qui l’attend ne pose pas de question ne demande pas d’aide ou de prêtre des choses comme ça juste elle dort et quand elle est éveillée regarde de son lit par la fenêtre le ciel le ciel par la fenêtre puis s’endort à nouveau. Tenir sa main pour toutes les choses que l’on ne peut pas dire qu’il est trop tard pour dire et quelques grains de riz avalés contre le corps qui fuit quelques grains de riz pour tout ce qu’on dit pas. Tenir sa main merde je peux seulement faire ça.
J’ai pas mis de sauce… On avait peur qu’elle aime pas… avec la sauce.