SACD - Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques
Entr'Actes
accueil
la moisson des auteurs
à l'étranger
la moisson des traductions
paroles d'auteurs
à l'affiche
au catalogue des éditeurs
archives actes du théâtre
 
 
Actes du théâtre :
la lettre d'information
 
Plan du site
 
[ anglais ]
 
 

la moisson des auteurs

 
     
L'Or et la paille
Pierre Barillet et Jean-Pierre Grédy
L'Or et la paille
crédits : Stéphane Trapier
Actes du théâtre n° 78.[ imprimer ]
Qu’est-ce qu’ils ont tous aujourd’hui à couper le courant ?
« Fauchés, Géraldine et Thierry occupent et saccagent l’appartement d’un ami. Ils revendent ses objets, donnent des fêtes, sollicitent des dons pour une vie de luxe très au-dessus de leurs moyens. Ils veulent taxer les copains, se faire inviter, mais le téléphone est coupé. Ils échafaudent des plans. Indignes et sans scrupules, ils draguent un riche magnat de l’industrie du tuyau et une veuve multimilliardaire. Ils visent les mariages blancs, veulent plumer leur pigeon respectif, et envisagent de se retrouver après coup. Mais Géraldine et Thierry se transforment au fil de la farce, car l’argent ne fait pas tout. Et pendant ce temps-là, les deux vieux, victimes de leur jeu, tombent ou retombent en amour l’un de l’autre.

En 1956, Barillet et Grédy, couple emblématique du théâtre de boulevard, composent L’Or et la Paille, avant Lily et Lily, Potiche, Fleur de cactus ou Folle Amanda. Dans ce quatuor d’entremêlements sardoniques, les portes claquent et les sonneries explosent. Les horloges se déglinguent dans une crise financière où deux bobos visent le train de vie d’une aristocratie moribonde. Comédienne formée au Conservatoire, réalisatrice d’un premier film Elle adore, Jeanne Herry met en scène une comédie de l’urgence. Elle rend grâce aux deux auteurs, monuments vivants du rire qui n’ont cessé d’épingler, dans des cadres dorés, les travers d’une petite bourgeoisie aux aspirations mesquines, une société hilarante, envenimée par le goût du fric et des futilités. »
Pierre Notte, programme du Théâtre du Rond-Point

« Pourquoi une reprise de L’Or et la paille ? Je pense que ce qui a séduit Jeanne Herry dans cette comédie vieille de plus d'un demi-siècle qu'elle va mettre en scène, c'est son modernisme, le portait d'une certaine jeunesse n'aspirant qu'au luxe et à l'argent et dont le cynisme trouve un écho dans celle de notre époque bling-bling.
Elle fut créée le 5 novembre 1956, le soir tragique où, en Hongrie, les insurgés lançaient à la radio de Budapest un ultime appel désespéré sous l'assaut des forces soviétiques.
"Que faisions-nous là, hier soir, alors que nos pensées étaient tendues vers les dramatiques évènements d'Egypte et de Hongrie, à écouter les futiles histoires de Géraldine et Thierry, jeune couple très moderne d'aventuriers bourgeois ? Eh! bien, je dois l'avouer, nous nous amusions beaucoup !" écrivait Paul Gordeaux dans France Soir. Et le terrible critique du Figaro Jean-Jacques Gautier concluait ainsi : " Puisse L'Or et la paille vous arracher deux heures durant, à vos soucis personnels et aux tragiques obsessions d'une époque fertile en horreur." Alors que Gredy et moi craignions que la tension qui régnait dans la salle au lever du rideau ne soit fatale à une comédie légère et élégante, ce fut le contraire et le public qui suivit nous fut reconnaissant de lui faire oublier les menaces qui ébranlaient les démocraties et pesaient de plus en plus lourdement sur la nôtre. " »
Pierre Barillet, 13 octobre 2014

Création au Théâtre du Rond-Point, du 4 mars au 5 avril 2015. Puis tournée.
Mise en scène : Jeanne Herry. Avec : Hélène Alexandridis, Olivier Broche, Céline Martin-Sisteron, Loic Riewer. Scénographie et costumes : Jane Joyet.

Personnages : 2 femme(s) - 3 homme(s) -
Librairie théâtrale

THIERRY Ce n’est pas juste !
GERALDINE Qu’est-ce qui n’est pas juste, mon chéri ?
THIERRY Que nous, qui aimons tant l’argent… nous en ayons si peu !
GERALDINE Tu veux dire : pas du tout ! Et endettés jusqu’au cou…
THIERRY Ah ! avoir un valet de chambre, une Bentley et des rendez-vous chez le chemisier…
GERALDINE Ah ! la masseuse et le cheval tous les matins !... Des robes que l’on achète au lieu de les emprunter ! … et un carnet de chèques qu’on effeuille comme une marguerite !...
THIERRY Voilà comment nous sommes, nous !
GERALDINE Voilà comment nous ne sommes pas, malheureusement !
THIERRY Comment faire quand on est né sans le sou, que l’on a aucun espoir d’héritage et que l’on a fait la bêtise d’épouser une jeune fille sans dot !
GERALDINE Dis donc ! … Nous aurons un jour la ferme près de Limoges… Et puis Papa est amiral !
THIERRY J’aurais préféré mandataire aux Halles !
GERALDINE Oh ! évidemment ! Lui aussi, surtout depuis qu’il est à la retraite, pauvre papa, mais que veux-tu, ce n’est pas de sa faute s’il a choisi la mauvaise voie !
THIERRY Enfin, toute fille d’amiral que tu es, je ne regrette rien.
GERALDINE Vous êtes trop bon !
THIERRY ….Mais pour ce qui est des rentes, je me mets la ceinture.
GERALDINE, sceptique Il y en a qui travaillent…
THIERRY Tu vois où ça les mène ! Aucun travail de nos jours ne rapporte vraiment de l’argent. Je parle de l’argent, l’Argent ! Avec un A majuscule ! Pas de médiocres appointements de chef de bureau qui vous font vivoter à la petite semaine… Le monde, Géraldine, se divise en deux catégories : ceux qui ont de l’argent – ceux qui n’en ont pas ! Et ceux qui n’en ont pas sont justement ceux qui travaillent !
GERALDINE Oui… enfin si tu étais à la tête d’une usine, ou chirurgien, ou coiffeur à la mode, nous aurions un peu plus que neuf mille francs devant nous !
THIERRY Mais je ne demande pas mieux que de diriger une usine, moi ! Je m’en sens même tout à fait capable ! Laquelle ? Est-ce qu’on me l’offre ? Est-ce qu’on m’en donne la chance ? Non ! Ah ! je t’assure que c’est décourageant pour les jeunes…
GERALDINE Toi ! Un des garçons les mieux habillés de Paris, parlant l’anglais avec l’accent d’Oxford… Je ne sais vraiment pas ce qu’il leur faut !
THIERRY Oh ! Bien sûr ! S’il s’agit de gagner cinquante mille francs par mois, je peux toujours décrocher un job dans une agence de voyage ou une maison de publicité. Qu’est-ce que cela changera, veux-tu me le dire, qu’est-ce que cela changera ? Avec nos besoins !
GERALDINE Il est vrai que tu te fais bien davantage par-ci par-là en ne fichant rien !
THIERRY Et puis comme ça, je reste disponible. Je dois être libre au cas où quelque chose de vraiment intéressant se présenterait, ce qui ne saurait tarder… Il faut viser haut !