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Coeur d'Acier
Magali Mougel
Coeur d'Acier
DR
Actes du théâtre n° 87.[ imprimer ]
Coeur d’acier , c’est l’histoire d’une vallée.
C’est ici, dans cette vallée, que vivent Doris et Joseph, leurs enfants
Anna et Bobby, et puis tous les autres.
Tout aurait pu être autrement, cependant il faut s’accommoder
du silence sans faille que cause l’extinction du dernier haut-fourneau
de la vallée.
Alors que partout ailleurs, dans le reste du pays, tout le monde
se moque de cette affaire, ici on continue la lutte, on garde la
tête haute et on tente d’interpeller encore et encore les pouvoirs
publics.
Le retour et l’annonce de l’ancienne tête de file des combats
syndicaux, devenue aujourd’hui eurodéputée, n’apaisera rien :
le site industriel est destiné à devenir un village vacances.

Pourquoi faire appel à une auteure ?
« Depuis quelques années, je recherche dans les textes dramatiques cette capacité qu’ont les auteurs à faire dialoguer l’indicible, ce qu’on ne saurait
exprimer, ce qui manque de mots. Le Groenland de Pauline Sales est une confidence, Nina, c’est autre chose de Michel Vinaver est un gigantesque
lapsus, Lune Jaune de David Greig est une parole retrouvée.
La prise de parole est un choix, un acte, et la prise de parole théâtrale
doit être un acte essentiel. Entendons-nous, pas rhétorique, pas extraordinaire,
essentiel. Il n’est pas le temps de l’actualité, du journalisme, mais
celui du recul, de l’analyse, sociologique, philosophique et politique.
Associer aujourd’hui Le Théâtre Exalté à une auteure, c’est comprendre
davantage ce que nécessite un verbe, et un verbe public qui plus est.
En nous inspirant de divers événements conduisant à des actes de dissidence,
nous ne souhaitons pas relater ce qui s’est déjà dit mais chiner
ce qui ne l’a pas été, ce qui se cache, dans les familles, dans les bureaux,
dans les couloirs, ou dans ces fameuses antichambres du théâtre classique.
Ce projet est peut-être la fin d’un cycle, ou le début d’un nouveau ;
l’envie sans doute d’emmener notre compagnie dans une démarche plus
collective encore, de rassembler nos préoccupations de représentation et
d’écriture, faire le choix d’une prise de parole publique et partager cette
responsabilité. »
Baptiste Guiton


Création les 5 - 6 novembre au Théâtre de Vénissieux ; le 13 novembre au Centre culturel de La Ricamarie ; les 8 - 9 décembre au Château Rouge à Annemasse ; du 8 au 11 mars 2016 au TNP à Villeurbanne.
Mise en scène : Baptiste Guiton. Scénographie : Damien Schahmaneche. Musique originale : Tommy Luminet et Sébastien Quencez. Lumières, vidéo et régie générale : Benjamin Nesme. Son et Régie générale : Clément-Marie Mathieu. Costumes : Aude Desigaux. Chorégraphie : Pauline Laidet. Accessoires et décoration : Quentin Lugnier. Avec : Antoine Besson, Olivier Borle, Émilie Chertier, Baptiste Guiton, Jérôme Quintard, Tiphaine Rabaud Fournier. Piano Jeanne Garraud, Guitare Sébastien Quencez, Lap-steel Tommy Luminet.

Personnages : 2 femme(s) - 4 homme(s) - + Piano, Guitare, Lap-steel

JOSEPH Sais-tu combien d’oiseaux j’ai pu rassembler dans ce pigeonnier, Doris ?
Sais-tu le temps que cela a pris pour rassembler dans ce pigeonnier ces oiseaux venus de tous les côtés du monde, Doris ?
Les races, je ne les différencie plus.
Ils peuplent mon monde, prennent la figure de mon monde.
Je les regarde et les nourris comme jamais je n’aurais pu nourrir quiconque.
Leurs plumes, doux ramages
sont autant de vie /
Certains d’entre eux étaient élevés pour parcourir des terres
transmettre par-delà des monts
des messages.
Aujourd’hui, ils ne servent plus à rien.
Aujourd’hui, c’est ça que tu cuisines, Doris.
Des oiseaux de collection qui ne finiront pas dans les bocaux d’un taxidermiste parce que nous les bouffons, Doris.
Je les égorge, tu les plumes, nous les mangeons.
De l’alouette de collection dans nos assiettes, Doris.
Je ne pensais pas que nous prendrions tant de plaisir à en faire des goulaschs, Doris.
Sais-tu, Doris, que je détruis tous les œufs qu’elles pondent ces dames ?
Je suis la vilaine accoucheuse.
Je prends les œufs et les jettent dans la poubelle.
C’est ça, cette odeur dans le pigeonnier.
C’est celle des cadavres qui pourrissent dans leur coquille.
Le comble Doris, c’est qu’au milieu de tout ce petit charnier, depuis une semaine, il y a eu une éclosion d’œufs de mouche.
Je voudrais ne plus les nourrir mes pigeons
que déjà leurs enfants morts nés ont trouvé le bon moyen de produire de la becquée pour leurs pères et leurs mères.
Ce grouillement, Doris /
Il est fascinant, non ?
N’aie donc pas peur, sotte.
Regarde.
Approche, je vais te montrer autre chose.
Ici /
Vois-tu
la poubelle s’est, je crois, transformée en couveuse.
Hier, je suis entré ici
et c’est un petit bruit
comme celui d’un chaton agonisant qui sortait de cette poubelle.
Il n’est pas très beau
ce rescapé.
Il est même terrible avec ses yeux cachés sous une membrane de peau.
Le plus juste serait de l’éclater contre un mur, Doris, ce petit monstre qui défie la nature.
Mais je suis qui /
Je suis encore un homme, Doris, non ?